Premier saut

Comment former un groupe affinitaire

Ceci est une traduction de l’introduction du livret proposé par @natacha ci-dessus. Je n’ai pas voulu continuer la traduction car selon moi, son approche est politiquement naïve… Je reviendrai sur ce point plus bas…

Que cinq personnes se rencontrent résolues à l’éclair de l’action plutôt qu’à l’agonie de la survie — à partir de ce moment-là, le désespoir prend fin et la tactique commence.

Ce guide est adapté d’une version antérieure qui est apparue dans notre* livre : Recettes pour un désastre : un livre de cuisine anarchiste.

* Ndt: il s’agit de CrimethInc. : Books : Recipes for Disaster

Nous traversons des temps turbulents. Déjà les blocages, les protestations, les émeutes et les escarmouches arrivent fréquemment. Il est grand temps de s’organiser pour les bouleversements imminents.

Mais s’organiser ne signifie pas rejoindre les ranges d’une institution existante et recevoir des ordres. S’organiser devrait être loin de sacrifier ton agence et ton intelligence pour devenir un autre engrenage d’une machine. Selon une perspective anarchiste, la structure organisationnelle devrait maximiser à la fois la liberté et
la coordination volontaire à chaque niveau d’échelle, du plus petit groupe à la société dans son ensemble.

Toi et tes ami·e·s constituez déjà un groupe affinitaire, la brique essentielle de ce modèle. Un groupe d’affinités est un cercle d’amis qui se comprennent comme une force politique autonome. L’idée est que des personnes qui se connaissent déjà et se font confiance devraient travailler ensemble à répondre immédiatement, intelligemment et souplement aux situations émergentes. Ce format sans chef a fait ses preuves effectives pour des activités de guérilla de toutes sortes, ainsi que dans les tactiques que la RAND corporation* appellent « fourmillantes » selon lesquelles de nombreux groupes autonomes, imprédictibles, surpassent un adversaire centralisé. Vous devriez vous rendre dans chaque protestation avec un sens partagé de vos buts et de vos capacités. Si vous êtes un groupe affinitaire expérimenté dans l’action commune, vous serez bien mieux préparé à répondre aux urgences et embrasser les opportunités inattendues.

* Ndt : la RAND corporation est un think tank militaire États-unien. Les swarming tactics correspondent à une approche stygmergique de l’action concertée, où chaque groupe peut laisser et répondre à des traces, ou signes laissés par d’autres pour appuyer et consolider leurs propres motivation et action.


Voilà. C’est bien triste de limiter la pensée anarchiste à des escarmouches en manif’. Je comprends l’idée et l’envie de créer des poches de résistance active qui soient solides, confiantes et qui partagent les liens indélébile de l’action concertée. Cependant, pour rappel :

La protestation, et notamment l’excitation d’une meilleure préparation « à répondre aux urgences et embrasser les opportunités inattendues » masque une position purement réactionnaire et, comme le soulignait Saul Newman dans son essai éponyme*, la soumission impotente au ressentiment d’une certaine approche de l’anarchisme classique. Certes, l’affrontement à l’hydre est nécessaire, mais n’offre-t-elle pas un double avantage tactique et stratégique à l’opération militaire anti-citoyenne : d’une part une justification pour la militarisation des unités de police – anti-émeutes ou pas – et une augmentation de la présence policière et répressive ; d’autre part une dislocation des capacités de résistance par la judiciarisation des « éléments subversifs » dont l’apparente invisibilité ne tient pas face aux arrestations de masse. Que faire donc, me direz-vous ? Abandonner l’affrontement ? Non, bien sûr, celles et ceux qui s’y adonnent doivent recevoir tout notre soutien pour le sacrifice de leurs vies – mais ils et elles devraient également, avant de céder à l’impulsion de l’instinct grégaire et du ressentiment à l’encontre des chiens de garde du pouvoir, considérer d’autres possibilités qui ne ressortent pas uniquement de la réaction. Encourager la réaction dans les mouvement révolutionnaires, cela ne sonne-t-il pas comme se tirer une balle dans le pied ?