Les femmes et la virologie

Continu - Virtuel - Dedans / Discontinu - Actuel - Dehors

Extrait de l’article de Lundi Matin par Barbara Glowczewski mentionné en ouverture de ce sujet.

J’ai montré ailleurs que l’ontologie aborigène semble changer selon le contexte, ce que les Warlpiri du désert théorisent comme un aller-retour nécessaire entre le « dessous/dedans » ( kanunju , le virtuel) et le « dessus/dehors » ( kankarlu , l’actuel). Par « dessous », dans le virtuel, l’ontologie warlpiri semble privilégier la continuité, mais par « dessus », dans l’actuel, l’ontologie valorise la discontinuité. Ce paradoxe de la tension ontologique entre continu et discontinu – qui est au cœur de tous les rituels des peuples du désert et aussi du Kimberley - est un aspect de ce que j’appelle le paradigme aborigène. Il me semble nécessaire de sortir des catégories ontologiques pour appréhender les processus d’hybridation divers que les peuples résistants inventent. Dans le cas australien on assiste à un « déploiement d’identités à polarités multiples, tensions et attracteurs, conjugaisons et disjonctions d’altérités dans un réseau dynamique et ouvert. »

Mesures temporaires / Démesure éternelle

Extrait d’une entrevue avec Edward Snowden sur ViceTV

Croyez-vous vraiment que lorsque la première vague, cette deuxième vague, la 16e vague du coronavirus seront un souvenir depuis longtemps oublié, ces capacités ne seront pas conservées ? Que ces ensembles de données ne seront pas conservés ? Quelle que soit la façon dont elle est utilisée, ce qui est construit, c’est l’architecture de l’oppression.[1]

Nécro-vitalisme, ou vampirisme capitaliste

Ainsi que j’espère clarifier, le Capitalisme entretient une relation unique au Désert, à l’Animiste et au Virus selon laquelle le Capitalisme voit ces choses comme détentrices d’un potentiel pour créer du profit ; c’est-à-dire, rien n’est inerte en soi, tout est vital du point de vue de la capitalisation et n’importe quoi peut devenir quelque chose de plus avec la bonne approche innovante. En effet les capitalistes peuvent ainsi être considérés comme les plus purs des Animistes. Cela dit, le capital industriel dépend de, et avec les États, police vigoureusement les séparations entre formes d’existence de sorte que certains existants peuvent devenir sujets à différentes sortes d’extraction. Ainsi même si les activistes et les universitaires mettent à niveau la relation entre la vie animale et parmi les objets (y compris les sujets humains), les États légifèrent aussi bien pour protéger les droits des entreprises et des corporations d’utiliser les animaux et les terres que pour criminaliser les tactiques de l’activisme écologiste et environnemental. En d’autres termes, comme le Virus se sert de, mais n’est pas ultimement tributaire de la différence entre le Vivant et le Non-Vivant, le Capital considère tous les modes d’existence comme s’ils étaient vitaux et impose que tous les modes d’existence ne soient pas les mêmes en terme d’extraction de valeur.[2]

Une sorte de manifeste crasse de l’analytique Karrabing [3]

  1. Les choses existent à travers un effort d’attention mutuelle. Cet effort n’est pas une vue de l’esprit mais relève de l’activité d’endurance.
  2. Les choses ne naissent pas ni ne meurent, toutefois elles peuvent se détourner les unes des autres et changer d’état.
  3. Lorsqu’elles se détournent les unes des autres, les entités retirent le soin qu’elles s’apportaient mutuellement. Donc la terre ne meurt pas. Mais la terre peut se détourner de certaines formes d’existence. Selon cette manière de penser, le Désert n’est pas ce en quoi la vie n’existe pas. Un Désert est l’endroit où une série d’entités ne prennent plus soin des sortes d’entités que sont les humains et donc procuré aux humains d’autres formes d’existence : os, momie, cendres et terreau.
  4. Nous devons dé-dramatiser la vie humaine car nous prenons carrément la responsabilité de ce que nous faisons. Ces dé-dramatisation et responsabilisation simultanées permettent de poser de nouvelles questions. Au lieu de la Vie ou de la Non-Vie, nous nous interrogerons sur quelles formations nous maintenons en existence ou nous éteignons.

  1. traduit par mes soins de l’original:

    Do you truly believe that when the first wave, this second wave, the 16th wave of the coronavirus is a long-forgotten memory, that these capabilities will not be kept? That these datasets will not be kept? No matter how it is being used, what’ is being built is the architecture of oppression.

    ↩︎
  2. traduit par mes soins :

    As I am hoping will become clear, Capitalism has a unique relation to the Desert, the Animist, and the Virus insofar as Capitalism sees all things as having the potential to create profit; that is, nothing is inherently inert, everything is vital from the point of view of capitalization, and anything can become something more with the right innovative angle. Indeed, capitalists can be said to be the purest of the Animists. This said, industrial capital depends on and, along with states, vigorously polices the separations between forms of existence so that certain kinds of existents can be subjected to different kinds of extractions. Thus even as activists and academics level the relation between animal life and among objects (including human subjects), states pass legislation both protecting the rights of businesses and corporations to use animals and lands and criminalizing tactics of ecological and environmental activism. In other words, like the Virus that takes advantage but is not ultimately wedded to the difference between Life and Nonlife, Capital views all modes of existence as if they were vital and demands that not all modes of existence are the same from the point of view of extraction of value.
    Geontologies, a requiem to late liberalism, Elizabeth A. Povinelli (2016)

    ↩︎
  3. traduit par mes soins :

    [A] sort of dirty manifesto to Karrabing analytics.

    1. Things exist through an effort of mutual attention. This effort is not in the mind but in the activity of endurance.
    2. Things are neither born nor die, though they can turn away from each other and change states.
    3. In turning away from each other, entities withdraw care for each other. Thus the earth is not dying. But the earth may be turning away from certain forms of existence. In this way of thinking the Desert is not that in which life does not exist. A Desert is where a series of entities have withdrawn care for the kinds of entities humans are and thus has made humans into another form of existence: bone, mummy, ash, soil.
    4. We must de-dramatize human life as we squarely take responsibility for what we are doing. This simultaneous de-dramatization and responsibilization may allow for opening new questions. Rather than Life and Nonlife, we will ask what formations we are keeping in existence or extinguishing?

    Geontologies, a requiem to late liberalism, Elizabeth A. Povinelli (2016)

    ↩︎
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